Voici un petit bijou de la littérature fantastique : Ambre de Roger Zelazny, qui est un auteur prolifique : près d’une 100° de nouvelles ; une 40° de romans.
Cet iceberg de pages et d’imagination a pour sommet la grande saga des princes d’ambre.
Cette fresque fantastique de 10 volumes peut en fait être scindée en 2 parties :
Le cycle de Corwin (5 premiers)
Le cycle de Merlin (5 premiers) (son fils)
Le début commence comme un polar. Un personnage se réveille amnésique dans un hôpital et s’en évade pour partir à l’aventure, en quête de son identité.
L’intrigue bascule rapidement vers le fantastique quand il apprend de la bouche d’une de ses sœurs être l’un des 9 princes d’ambre…
L’univers peut être représenté par un ensemble de cercles concentriques (comme les ondes quand on jette un caillou dans l’eau). Au centre : Ambre : le seul monde réel : le modèle métaphysique de tous les mondes alentours : toutes les terres (dont la notre – dans laquelle se déroule d’ailleurs une bonne partie de l’histoire) ne sont que des « ombres », des reflets d’Ambre de plus en plus imparfaits au fur et à mesure de leur éloignement par rapport à cette source de pureté .
A l’extrême périphérie de l’univers : le chaos- la matrice de la création, dans toute sa diversité et son immensité. La marelle, située au cœur d’Ambre et crée par Dworkin (un être supérieur issu du chaos) et la licorne, vint réorganiser les éléments issus du chaos, ordonner l’univers.
Ambre et le chaos forment ainsi les 2 pôles de cet univers complexe.
Corwin, le héros du premier cycle, va devoir recouvrer la mémoire pour découvrir son identité et le destin qui le lie à Ambre. Il va dès lors se trouver opposé à un conquérant avide de pouvoir qui veut régner sur Ambre et qui n’est autre que son frère…
La famille est centrale, dans cette saga. Les frères et sœurs s’allient, se déchirent au rythme de leur ambition ou de leurs aspirations à un univers meilleur. L’intrigue se déroule dans un vaste cour bigarrée de personnages hauts en couleurs, tous plus étranges et fascinants les uns que les autres ; frères et sœurs, cousins, mentors… tout ce petit monde intrigue, conspire, fomente des complots dans l’ombre…
La psychologie des personnages est travaillée avec soin, et comme je le disais plus haut, tous sont intéressants, dotés d’une personnalité bien dessinée, fascinants parfois (c’est le cas notamment du personnage principal : Corwin : une sorte de dandy mondain, subtil et fin bretteur à la fois. C’est le héros charismatique par excellence ; charmeur, plein d’assurance et doué de ressources insoupçonné. Il ne sombre pas dans la caricature non plus (comme on pourrait le craindre avec son côté séducteur) ; c’est un personnage complexe qui s’adapte et change d’attitude en fonction des situations. Ainsi, son côté mondain est plus calculé ; une manière de faire usage de l’étiquette, qu’une véritable nature (ce qui aurait pu être pénible à la longue). Bon, pour exemplifier grossièrement, c’est un peu une sorte de nicky larson avec le côté pro à la clint eastwood bien dessiné, et sans le côté obsédé. Bref, c’est un personnage éminemment charismatique, ce qui sert plutôt la saga dans sa globalité, vu qu’il en est le personnage principal…
C’est la seule saga (quand même 10 volumes au total) que j’ai lu 3 fois !!! a chaque fois, j’attends quelques années que le temps fasse son lent travail de désagrégation des souvenirs pour m’y replonger avec un plaisir quasiment intact.
L’autre point fort de la série, outre la complexité de son univers, dévoilé au compte goutte, c’est le mystère… Jamais je n’avais lu une série fantastique ou l’intrigue occupait une place aussi centrale. Ce n’est pas un mystère qui nous tient en haleine et pousse nos mains fébriles à tourner les pages, encore et encore ! Il y en a plusieurs en parallèle. Une multitude de mystères, centraux ou périphériques qui bercent notre imaginaire et nous donnent envie de connaître la suite (ils se dévoilent parfois plusieurs volumes plus tard, ajoutant à notre compréhension et dévoilant à chaque fois de nouvelles perspectives…). Sans parler des rebondissements qui viennent sans cesse changer la donne et dévoiler un fragment de mystère, ajouter une pièce au puzzle… Cette saga n’est jamais statique, donc. Il se passe toujours quelque chose. Son parfum de secret enivre le lecteur et l’immerge complètement dans l’œuvre. Une fois entamée l’épopée des princes d’ambre, impossible de décrocher.
Un bémol toutefois, Zelazny, l’auteur, a eu l’extrême indélicatesse de mourir avant d’avoir achevé son œuvre. Si bien que le 10° volume s’achève en queue de poisson et que beaucoup de questions restent sans réponses… mais bon, j’encourage vivement à dépasser cette frustration annoncée pour plonger dans le multivers et partir à la découverte d’Ambre et de ses ombres…
A noter comme trouvaille (entre autres, mais mes souvenirs sont imprécis, il y a longtemps que je l’ai lu (il va falloir que je m’y remette), la présence d’atouts de tarots (qui peuvent être achetés en vrai, illustrés par florence Magnin) qui permettent aux princes d’ambre de créer un lien télépathique entre eux, et même de se téléporter.
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